Il n’y a pas de cessez-le-feu à Gaza

En fin de compte, pour qu'un véritable cessez-le-feu aboutisse, l'administration Trump devra exercer une pression constante sur Netanyahu pour qu'il le respecte. Cet effort consiste notamment à tenir toutes les parties responsables de toute violation du cessez-le-feu, en particulier en tant que garant de l'accord. Le cessez-le-feu et toute chance d'une paix plus large échoueront si Washington cède à ses pires impulsions et permet ensuite à Israël d'agir de son propre chef.
novembre 3, 2025
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L’administration Trump doit être prête à faire pression sur Benjamin Netanyahu si elle veut sauver son plan de paix.

Tout semblant de cessez-le-feu à Gaza a pris fin cette semaine avec la brève reprise de la guerre totale contre le Hamas par Israël le 28 octobre. Bien que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ait déclaré unilatéralement la reprise du cessez-le-feu le lendemain, la réalité est claire : tout accord qui permet à l’une des parties de violer systématiquement ses termes à sa guise ne constitue qu’un ensemble de mots sans signification sur le papier. Sans une pression soutenue de la part des États-Unis, cette dynamique ne fera qu’empirer.

Les violations israéliennes avant les frappes de cette semaine avaient déjà suscité de sérieuses inquiétudes quant à la durabilité du cessez-le-feu. Depuis son entrée en vigueur le 10 octobre, Israël a continué à limiter l’acheminement de l’aide humanitaire vers Gaza, un élément central de l’accord conclu avec le Hamas pour mettre fin aux combats. Il a régulièrement frappé la bande de Gaza, invoquant des informations non confirmées faisant état d’attaques du Hamas contre ses forces, tuant plus de 100 personnes et en blessant des centaines d’autres. Il refuse d’ouvrir des points de passage supplémentaires qui permettraient de renforcer l’acheminement de l’aide aux civils palestiniens affamés et appauvris.

Pour être clair, tout acteur qui viole le cessez-le-feu doit être tenu responsable de ses actes. Cela inclut le Hamas, qui s’efforce certainement de retrouver sa puissance et qui défiera Israël dès qu’il le pourra. Si de nombreux rapports faisant état d’attaques contre les forces israéliennes sont exagérés ou incorrects, en grande partie parce que certains de ses combattants restent déconnectés des chaînes de commandement, le Hamas a également signé un accord qu’il doit respecter.

Néanmoins, l’asymétrie des pouvoirs et l’influence des États-Unis sur Israël ont leur importance dans ce contexte, d’autant plus que ce dernier a rompu unilatéralement les précédents cessez-le-feu. Les nouvelles frappes israéliennes du 28 octobre, qui ont tué plus de 100 personnes supplémentaires, dont 46 enfants, mettent fin à toute idée d’un véritable cessez-le-feu à Gaza aujourd’hui. Au contraire, les mêmes règles qui ont accordé une indulgence exceptionnelle à Israël pendant des décennies continuent de prévaloir. À ce titre, l’accord avec le Hamas ressemble au « cessez-le-feu » entre Israël et le Hezbollah au Liban, avec ses bombardements continus et son occupation illégale du territoire souverain libanais.

Dans ce contexte, Israël impose sa volonté à un nouveau gouvernement libanais réformiste avec le soutien total de Washington. Les résultats parlent d’eux-mêmes : les nobles efforts visant à désarmer le Hezbollah se heurtent à des obstacles, car la présence continue d’Israël ne fait que renforcer la raison d’être du groupe, à savoir résister à l’occupation israélienne.

Comme le Hamas, le Hezbollah profitera de cette dynamique pour conserver ses armes et son pouvoir. Pendant ce temps, les réfugiés libanais et syriens, impuissants, sont pris au piège, probablement considérés comme un autre moyen de pression sur Beyrouth par les dirigeants israéliens et américains, plutôt que comme des civils méritant dignité et sécurité, et non comme le pire de la realpolitik dictant le soi-disant « Nouveau Moyen-Orient ».

Cet avenir semble également se profiler pour Gaza, mais dans des conditions pires, quasi apocalyptiques, pour les civils palestiniens de la bande de Gaza. Presque tous sont déplacés, et la plupart des infrastructures publiques sont détruites. La famine persiste dans un contexte d’insécurité alimentaire généralisée et de malnutrition infantile. Les combats intra-palestiniens entre le Hamas et les milices soutenues par Israël menacent quotidiennement les civils.

Dans le cadre du soi-disant cessez-le-feu et du plan de paix en 20 points du président américain Donald Trump, Israël contrôle toujours environ 53 % de Gaza, avec un langage vague dictant un futur retrait plus proche de 8 % – appelé « zone tampon » entourant la frontière contestée entre Gaza et Israël – après le désarmement du Hamas. Les responsables israéliens et américains parlent ouvertement de ne reconstruire que les zones contrôlées par Israël, dans le cadre d’une réorientation claire du plan visant à déplacer les Palestiniens vers les anciennes « zones humanitaires », que beaucoup comparaient à des camps de concentration.

Chacun de ces développements inquiétants suggère que le reste du plan en 20 points de Trump n’est que des paroles en l’air. En termes simples, ni le Hamas ni Israël ne se font confiance et ne semblent intéressés par la mise en œuvre complète des points déjà vagues de ce plan. Au contraire, les deux parties semblent vouloir tirer le meilleur parti possible de la situation, alors que Washington retombe dans ses mauvaises habitudes, à savoir le soutien inconditionnel à Israël.

Le secrétaire d’État américain Marco Rubio, aux côtés de Trump, a affirmé cette semaine qu’Israël avait le droit de frapper des cibles à Gaza, considérant que ces actions étaient valables au regard des détails du cessez-le-feu. De telles affirmations contredisent la définition fondamentale qui sous-tend ce terme et ces accords. Un cessez-le-feu unilatéral n’est pas un cessez-le-feu.

Que des responsables américains de haut rang fassent de telles déclarations défie toute logique, surtout si l’on considère le capital politique considérable investi par l’administration Trump pour parvenir à ce cessez-le-feu. S’il y a une caractéristique essentielle à comprendre chez le président américain, c’est qu’il déteste perdre, et encore plus donner l’impression de perdre. Permettre à Netanyahu de détruire un cadre de paix générationnel va à l’encontre de ces caractéristiques largement reconnues, même si l’on tient compte de la bonne foi pro-israélienne qui sous-tend plus largement l’administration Trump.

Reste à voir si Trump exercera davantage de pression sur Israël. Il est certain que Washington a contraint le gouvernement israélien à signer son cessez-le-feu et son plan de paix plus large, et qu’il a exercé à plusieurs reprises une pression efficace sur Netanyahu. Cependant, l’administration Trump continue de servir les intérêts israéliens dans leur ensemble et ne devrait pas être dispensée de son rôle actif et direct dans la destruction de Gaza.

En fin de compte, pour qu’un véritable cessez-le-feu aboutisse, l’administration Trump devra exercer une pression constante sur Netanyahu pour qu’il le respecte. Cet effort consiste notamment à tenir toutes les parties responsables de toute violation du cessez-le-feu, en particulier en tant que garant de l’accord. Le cessez-le-feu et toute chance d’une paix plus large échoueront si Washington cède à ses pires impulsions et permet ensuite à Israël d’agir de son propre chef.

Pour les Palestiniens de Gaza confrontés à un génocide, cette issue équivaut à une condamnation à mort. Seul un véritable cessez-le-feu peut mettre fin à ces souffrances et, espérons-le, ouvrir la voie à la reconstruction et à la réhabilitation. Tout ce qui est en deçà serait un échec de la part d’une administration américaine qui a la capacité de maintenir la pression et de jouer un rôle véritablement constructif.

* Alexander Langlois est collaborateur pour Defense Priorities. M. Langlois est titulaire d’une maîtrise en affaires internationales de l’American University, où il s’est spécialisé dans la gouvernance mondiale, la politique et la sécurité. Il est analyste et auteur en politique étrangère, et a publié dans divers médias, notamment Sada du Carnegie Endowment for International Peace, MENASource de l’Atlantic Council, le Lowy Institute, le Gulf International Forum, The New Arab, The Nation, Inkstick et The National Interest.

Source : https://nationalinterest.org/blog/middle-east-watch/there-is-no-ceasefire-in-gaza

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