Constantin, Arius et Constantinople

Les idées d’Arius trouvèrent un large soutien surtout en Anatolie et en Afrique du Nord. Ces communautés continuaient à considérer Jésus (paix sur lui) comme le serviteur et le messager de Dieu. Cette croyance présentait une grande proximité avec la conception islamique du Tawhid. Cependant, l’autorité ecclésiastique renforça progressivement la foi en la Trinité et déclara les opinions d’Arius et de ceux qui partageaient ses vues comme des “hérésies”. C’est pourquoi le monde chrétien fut ébranlé pendant de longues années par des divisions religieuses. Les Églises qui avaient adopté la doctrine trinitaire forgèrent de nombreuses lettres pour prouver que Constantin, dans les dernières années de sa vie, n’avait pas adhéré au courant d’Arius.
octobre 2, 2025
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Les idées d’Arius trouvèrent un large soutien surtout en Anatolie et en Afrique du Nord. Ces communautés continuaient à considérer Jésus (paix sur lui) comme le serviteur et le messager de Dieu. Cette croyance présentait une grande proximité avec la conception islamique du Tawhid. Cependant, l’autorité ecclésiastique renforça progressivement la foi en la Trinité et déclara les opinions d’Arius et de ceux qui partageaient ses vues comme des “hérésies”. C’est pourquoi le monde chrétien fut ébranlé pendant de longues années par des divisions religieuses. Les Églises qui avaient adopté la doctrine trinitaire forgèrent de nombreuses lettres pour prouver que Constantin, dans les dernières années de sa vie, n’avait pas adhéré au courant d’Arius.

 

À l’occasion du 1700ᵉ anniversaire du Concile de Nicée (Nicomédie), l’influence de la pensée unitarienne (tawhidienne), défendue par le religieux libyen Arius au sein du christianisme, se poursuivit même après sa mort en 336. Depuis des siècles, la question de savoir si Constantin (Constantinus), fondateur de Constantinople (Istanbul) qui, lors du concile, demeurait encore attaché à la croyance païenne s’était réellement converti au christianisme, et si oui, à quelle confession il appartenait, demeure un sujet de débat.

Constantin n’était ni un savant ni un homme particulièrement pieux ; il avait passé sa vie comme soldat. Cependant, il a marqué l’histoire comme l’un des empereurs romains les plus célèbres. Il parvint à réunifier l’Empire romain sous un seul centre. Des îles britanniques à l’Irak, du Maghreb jusqu’à l’Allemagne, il rétablit l’autorité romaine sur d’immenses territoires. Il fut celui qui refonda l’Empire. Il bâtit comme capitale la ville qu’il appela de son propre nom, “Constantinople / Constantinopolis” (Istanbul). Cette cité devint le centre à la fois de l’Empire romain d’Orient et d’Occident. Un tel personnage n’existait pas dans l’histoire romaine ; les historiens l’ont comparé à César et à Napoléon.

L’empreinte de Constantin ne se limite pas à ses succès militaires et politiques ; ses positions dans les affaires religieuses ont également déterminé son rôle historique. Lors du Concile de Nicée, qu’il convoqua afin de rassembler les différentes confessions chrétiennes, l’empereur, encore attaché au paganisme, soutint la doctrine trinitaire, car elle était plus proche de la pensée païenne. Ainsi, il ouvrit la voie à un processus qui allait constituer un tournant majeur dans l’histoire du christianisme. Or, jusqu’à cette époque, le christianisme était représenté par une foi simple en un Dieu unique, conforme au tawhid. C’est précisément à ce moment-là que l’histoire prit une autre direction.

Les historiens musulmans mentionnent l’existence, parmi les chrétiens, de communautés dont la foi se rapprochait de l’islam. Ces groupes considéraient Jésus (paix sur lui) non pas comme Dieu, mais comme le serviteur et messager de Dieu. À l’époque de l’expansion islamique, les musulmans rencontrèrent en Anatolie, au Maghreb et en Andalousie de nombreux chrétiens affiliés à la doctrine d’Arius. Ils remarquèrent leur proximité avec l’islam. Leur conviction était claire : “Jésus est un serviteur, le Messager de Dieu ; il est la Parole et l’Esprit créés par Dieu, et non pas le fils de Dieu.”

Après le Concile de Nicée, Constantin se rapprocha davantage des idées d’Arius. Il rappela d’exil Arius et ses partisans, leur laissant l’espace nécessaire pour diffuser leurs croyances. C’est pourquoi les chefs ecclésiastiques partisans de la Trinité lui vouèrent de l’hostilité. Selon les historiens, sa mère Hélène l’inclinait également vers les ariens. Leurs vues paraissaient plus conformes à la raison et à la vérité.

Ainsi commença un conflit qui allait durer de longues années dans le monde chrétien. La lutte entre les partisans de la Trinité et les défenseurs d’Arius s’inscrivit au cœur de l’histoire du christianisme. Les décisions du Concile de Nicée en 328 marquèrent le point de départ de cette transformation. Trois ans après le concile, Hélène mourut ; Constantin, lui, demeura sur le trône.

Après la mort d’Hélène, les puissants prêtres de l’Église prirent le dessus. Les partisans d’Arius restèrent en retrait. Cependant, les idées d’Arius continuaient d’exercer leur influence parmi le peuple. Cette situation obligea les dirigeants de l’Église à prendre de nouvelles décisions. Le célèbre historien Mark Nixon écrit : “Constantin et ses successeurs laissèrent les ornements et la splendeur de la vie entre les mains des chefs de l’Église. Et ces chefs allèrent jusqu’à tromper le peuple et exagérèrent dans la propagation de la Trinité.”

Constantin ne fut officiellement considéré comme chrétien qu’après avoir reçu le baptême, peu avant sa mort. C’est pourquoi les historiens divergent sur la question de savoir s’il fut un chrétien sincère. Certains estiment qu’il adopta le christianisme pour des raisons politiques, d’autres soutiennent qu’influencé par sa mère Hélène, il embrassa plus tard la pensée unitarienne et crut en elle.

Constantin fut le premier empereur à accorder la liberté de culte aux chrétiens grâce à l’édit de Milan. Les chrétiens, auparavant persécutés, furent libérés sous son règne. Ce développement est considéré comme un tournant dans l’histoire du christianisme. Toutefois, la politique joua un grand rôle dans ses choix religieux. Il visait à unir le christianisme aux intérêts de l’Empire. Comme le disait le célèbre philosophe Nietzsche : “L’Occident fit de Jésus, qu’il avait crucifié à Jérusalem, un Dieu à Rome.”

Constantin marqua l’histoire de l’Empire à la fois par ses victoires militaires et par ses choix religieux. Il n’abolit pas totalement la culture païenne ; il tenta de maintenir la coexistence des différentes croyances. Son héritage peut être résumé en deux points :

1 – La fondation de Constantinople : en transférant la capitale de l’Empire romain dans cette ville, il changea le cours de l’histoire. La cité devint l’un des centres les plus importants du monde pendant des siècles.

2 – Le Concile de Nicée : convoqué à son appel, ce concile constitua un tournant dans l’histoire du christianisme. La foi en la Trinité y fut officialisée ; mais elle apporta aussi avec elle de nouveaux conflits.

À la fin de sa vie, Constantin rappela Arius de l’exil et se rapprocha ainsi des chrétiens unitariens. Le grand savant andalou Ibn Hazm, dans son œuvre Al-Faṣl – Histoire des religions et des sectes, écrit : “Arius croyait que Jésus (paix sur lui) n’était que le serviteur et le messager de Dieu, qu’il était la Parole de Dieu et l’Esprit qu’Il avait créé. Constantin fut le premier fondateur de Constantinople. Parmi les rois de Rome, il fut le premier à accepter le christianisme. Il suivait la doctrine d’Arius.”

L’historien Timothy E. Gregory, dans son livre Histoire de Byzance, dit ceci : “Constantin ne comprenait pas pourquoi l’arianisme s’était répandu si rapidement malgré sa condamnation en 325. Il commença à penser que la décision du concile de Nicée était erronée et se tourna vers les enseignements d’Arius. Il réunit des conseillers proches de l’arianisme comme Eusèbe de Nicomédie et fut baptisé par Eusèbe.”

Le célèbre historien Alexander A. Vasiliev note dans son volumineux ouvrage Histoire de l’Empire byzantin : “Dans les dernières années du règne de Constantin, l’arianisme avait pénétré jusqu’au cercle de la cour et commençait à s’enraciner de plus en plus fortement dans la partie orientale de l’Empire. La plupart de ceux qui défendaient le credo de Nicée avaient été écartés, destitués de leurs charges et envoyés en exil. Cependant, les données historiques que nous possédons sur la suprématie de l’arianisme à cette époque n’offrent pas de certitude, en raison du manque de fiabilité des sources et du caractère insuffisamment clair des circonstances.”

Dans son ouvrage Histoire de l’État byzantin, l’historien Georg Ostrogorsky écrit à ce sujet : “Il existe peu de problèmes que la science historique ait discutés avec autant d’effort et aussi fréquemment, et auxquels elle ait apporté des réponses aussi diverses, que la question de la relation de Constantin à la foi chrétienne.”

En 337, lors d’une campagne contre les Sassanides, Constantin tomba malade en route et mourut à Nicomédie. Selon son testament, il fut enterré dans l’église des Saints-Apôtres. Les débats ne cessèrent pas après sa mort. Ses successeurs soutinrent tantôt les partisans de la Trinité, tantôt les disciples d’Arius.

Les idées d’Arius trouvèrent particulièrement un large écho en Anatolie et en Afrique du Nord. Ces communautés continuaient à voir en Jésus (paix sur lui) le serviteur et le messager de Dieu. Cette foi présentait une grande proximité avec la conception islamique du tawhid. Mais l’autorité ecclésiastique renforça progressivement la croyance en la Trinité et déclara “hérétiques” les vues d’Arius et de ses semblables. C’est ainsi que le monde chrétien fut secoué pendant de longues années par des divisions religieuses. Les Églises ayant adopté la foi trinitaire forgèrent de nombreuses lettres pour prouver que Constantin, dans les dernières années de sa vie, n’avait pas adhéré à la doctrine d’Arius.

 

Note : Dans notre prochain article, nous accorderons une large place au fils arien de Constantin et aux activités qu’il mena à Constantinople afin de répandre la pensée unitarienne.

 

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