Le nouveau rêve de réforme de Trump : le plan Mar-a-Lago.

Il est désormais une réalité historique que l’économie mondiale ne change pas par des crises modérées, mais à la suite de grands bouleversements. La crise de 1929, Bretton Woods en 1944, le choc Nixon de 1971, l'accord du Plaza en 1985, le tsunami Lehman de 2008… Et maintenant, une nouvelle vision est en scène : elle n’a pas encore été officiellement mise en œuvre, mais son effet de séisme sur le système économique international se fait déjà clairement sentir : Mar-a-Lago !
avril 25, 2025
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Il est désormais une réalité historique que l’économie mondiale ne change pas par des crises modérées, mais à la suite de grands bouleversements. La crise de 1929, Bretton Woods en 1944, le choc Nixon de 1971, l’accord du Plaza en 1985, le tsunami Lehman de 2008… Et maintenant, une nouvelle vision est en scène : elle n’a pas encore été officiellement mise en œuvre, mais son effet de séisme sur le système économique international se fait déjà clairement sentir : Mar-a-Lago !

 

 Le nouveau rêve de réforme de Trump : le plan Mar-a-Lago

Il est désormais une réalité historique que l’économie mondiale ne change pas à la suite de crises modérées, mais bien après de grands bouleversements. La crise de 1929, Bretton Woods en 1944, le choc Nixon de 1971, l’accord du Plaza en 1985, le tsunami Lehman en 2008… Et aujourd’hui, une nouvelle vision fait son apparition : bien qu’elle n’ait pas encore été officiellement mise en œuvre, elle provoque déjà une onde de choc claire dans le système économique international : Mar-a-Lago !

Quand le nom du plan a été entendu pour la première fois, il pouvait évoquer un simple slogan marketing ou le nom d’une petite ville américaine, mais il s’agit en réalité du signe distinctif d’une stratégie susceptible de devenir le plus grand coup d’échecs économique et géopolitique du XXIe siècle. Elle s’impose déjà dans l’agenda mondial et attend le moment de s’inscrire dans les livres d’histoire.

Préparé sous la direction de Donald Trump, redevenu président des États-Unis, et sous la coordination du secrétaire au Trésor Scott Bessent, ce plan est un programme écopolitique global, regroupant une série de mesures et d’actions visant à organiser de manière plus systématique et à une échelle mondiale le combat économique des États-Unis, notamment contre la Chine.

Mar-a-Lago est un plan d’envergure mondiale qui vise à rapatrier la production et l’industrie sur le sol américain, à orienter la production vers des partenaires fiables grâce à la stratégie dite de “friend-shoring”, et à réduire progressivement la dépendance envers la Chine, dans l’objectif de redéfinir l’équilibre commercial mondial.

C’est donc une vaste opération internationale cherchant à redéfinir les règles du commerce mondial au profit des États-Unis…

Le renforcement du statut du dollar en tant que monnaie de réserve, le désir d’accroître le contrôle global du système financier américain et l’établissement de normes en matière d’économie numérique font partie des objectifs centraux de Mar-a-Lago.

Sous cet angle, ce plan doit être vu dès le départ comme un reflet du désir des États-Unis, à l’aube du deuxième quart du XXIe siècle, de consolider non seulement leur leadership géopolitique mais aussi leur hégémonie géoéconomique.

Un nouvel ordre mondial proclamé depuis un manoir

Mar-a-Lago n’est pas seulement le nom de la somptueuse résidence de Donald Trump en Floride. C’est également devenu le cerveau stratégique de ses campagnes électorales, le quartier général de la transformation au sein du Parti républicain, et désormais le nom d’un nouveau manifeste économique.

Cette approche, qui place le nationalisme au centre et privilégie les intérêts américains face aux engagements mondiaux, cherche à définir la stratégie fondamentale sur des questions telles que la valeur du dollar, la structure des marchés obligataires, les équilibres commerciaux avec la Chine et la dépendance sécuritaire des pays alliés. Pour atteindre cet objectif, elle vise à maintenir la souveraineté financière des États-Unis non pas par des moyens traditionnels, mais par une “reconception contraignante”.

De Bretton Woods à Mar-a-Lago…

Face à une économie américaine affaiblie depuis 2008 et la pandémie de Covid, et à la montée en puissance incontestable de la Chine, le plan Mar-a-Lago constitue la réponse offensive. Il a déjà franchi un premier pas avec l’imposition de droits de douane.

Ce système, qui vise à reconstruire l’ordre monétaire international, est qualifié par les analystes de version 2.0 de Bretton Woods, qui avait réuni 44 pays après la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, cette fois, le processus ne recherche le consentement de personne et impose des règles dictées par un seul pays, ce qui rend cette nouvelle version potentiellement destructrice.

Scott Bessent et le conseil de guerre économique

Parmi les architectes du Plan Mar-a-Lago, la figure la plus marquante est sans conteste Scott Bessent, un nom que je mentionne fréquemment dans mes articles et commentaires.

Ancien gestionnaire de fonds pour George Soros, Bessent, autrefois défenseur du libre marché, prône aujourd’hui la réindustrialisation des États-Unis, la collatéralisation du dollar et la réforme de la structure de la dette.

Cet homme singulier, qui fit gagner un milliard de livres à Soros en spéculant contre la Banque d’Angleterre, est devenu secrétaire au Trésor après la victoire électorale de Trump en 2024. Dès son arrivée, il a signé des décisions économiques qui ont secoué le monde.

À mes yeux, Bessent est l’un des principaux acteurs intellectuels et pratiques du Plan Mar-a-Lago. Il bâtit sa stratégie sur le postulat que “le dollar ne doit pas seulement inspirer confiance, il doit aussi être garanti”. Il défend l’idée que le Trésor américain doit offrir un nouveau cadre de sécurité non seulement par les taux d’intérêt, mais aussi via l’or, les terres publiques ou des obligations à coupon zéro de très long terme.

Par ailleurs, trois autres figures clés attirent mon attention dans le cadre de ce plan :

La première est Stephen Miran, technocrate à l’origine du concept d’obligations à 100 ans, qui souhaite refonder les instruments d’endettement des États-Unis.

Le second est Peter Navarro, architecte des guerres commerciales contre la Chine et auteur du livre Death by China, considéré comme une ressource précieuse par Trump.

Enfin, Robert Lighthizer, connu pour ses déclarations protectionnistes et ses critiques envers l’Organisation mondiale du commerce, pose les fondations du plan Mar-a-Lago.

Ce groupe, comme le montrent ses idées, est radicalement opposé aux élites traditionnelles de Wall Street. Tous défendent non pas la mondialisation, mais le nationalisme économique et le protectionnisme stratégique.

Ils considèrent que l’argent n’est plus seulement une arme de marché, mais aussi un outil géopolitique.

Que disent Wall Street, Davos et le bloc FMI ?

Dans le cadre que je viens d’exposer, il est aisé de comprendre que l’opposition la plus virulente au Plan Mar-a-Lago émane sans surprise des élites financières mondiales.

Les grands acteurs de Wall Street, les cercles de Davos, ainsi que les technocrates du FMI et de la Banque mondiale qualifient ce plan de « destructeur du système », « déstabilisant pour les marchés obligataires » et « menaçant pour le statut de monnaie de réserve du dollar ».

Les gestionnaires célèbres des grands fonds internationaux redoutent que la mise en œuvre du plan entraîne une hausse des taux d’intérêt obligataires, une montée de l’inflation et une fuite massive des capitaux des pays émergents.

Par conséquent, ils craignent sérieusement que le Plan Mar-a-Lago ne devienne, en plus d’une guerre commerciale, une véritable « guerre de reconstruction monétaire et de puissance », susceptible de provoquer une crise financière mondiale.

En cherchant à reconstruire la position hégémonique du dollar à travers l’or, les terres publiques et les politiques de sécurité, le plan fait peser la menace d’une disparition du rôle stabilisateur d’institutions comme le FMI, ce qui alimente davantage encore les craintes d’un chaos dans les périodes d’instabilité.

Prévisions pour un avenir proche

Si le Plan Mar-a-Lago devait être mis en œuvre dans son intégralité, cinq conséquences majeures pourraient affecter l’économie mondiale.

Premièrement, le statut de monnaie de réserve du dollar pourrait rapidement être remis en question. En effet, la proposition d’un dollar garanti risque d’ébranler profondément la confiance dans le système obligataire actuel.

Deuxièmement, on pourrait assister à une volatilité sans précédent dans les mouvements de capitaux mondiaux.

Dans un tel contexte, les capitaux spéculatifs quittant les pays émergents pourraient chercher des refuges sûrs, non plus dans les obligations, mais dans des actifs physiques. J’ose à peine imaginer les anomalies que cela engendrerait sur les prix de l’or et de l’argent, notamment.

Troisièmement, une telle configuration provoquerait une explosion de l’inflation à l’échelle mondiale. Car avec les droits de douane et les incertitudes, les coûts de production grimperaient durablement, rendant les importations de plus en plus onéreuses.

Quatrièmement, les risques géopolitiques étant en hausse, des contre-mesures de la Chine, de l’Inde et de l’Europe pourraient rapidement mener à la formation de nouveaux blocs commerciaux.

Cinquièmement, et peut-être surtout, le risque de marginalisation du FMI et de la Banque mondiale, révélateur du fait que ce nouvel ordre reposerait non sur le multilatéralisme mais sur un leadership fondé sur l’hégémonie.

Dans un tel environnement, la disparition d’institutions de stabilisation et de soutien à l’échelle mondiale pourrait entraîner une multitude de complications que nous ne pouvons même pas toutes énumérer ici.

Si je devais résumer tout ce que j’ai écrit en un seul paragraphe : nous ne savons pas dans quelle mesure Trump et son équipe pourront concrétiser leurs ambitions dans le cadre du Plan Mar-a-Lago. Mais une chose est désormais claire : l’ancien ordre mondial ne répond plus aux dynamiques actuelles. Chaque pas accompli dans le cadre de ce plan doit être vu comme un clou enfoncé dans le cercueil de l’ancien système.

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