En tant que pays directement affecté par les développements dans la région, la question « Faut-il maintenir Daesh comme une menace sous contrôle ou l’éliminer ? » est d’une grande importance pour la Turquie. Tout le monde sait que le fait de laisser des dizaines de milliers de personnes dans des conditions déplorables, marquées par la torture et la violence – comme le rapportent de nombreuses sources – pourrait créer un terreau fertile pour l’émergence de nouvelles organisations. La solution juste consiste à traiter le problème à la racine. Cependant, lorsqu’on prend en compte les actions communes des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni et des groupes affiliés au PKK, il est possible de dire que ces acteurs souhaitent que l’organisation demeure une menace sous contrôle.
D’une certaine manière, il s’agit ici de la question des organisations créées dans le contexte du monde unipolaire qui a émergé après la Guerre froide. L’activité principale menée à travers ces organisations, « produites » ou encouragées par l’Occident, repose sur une définition permanente de la menace afin de maintenir en état d’alerte des régions situées en dehors de leurs propres territoires. Pendant de nombreuses années, les peuples et les pays ont été contrôlés sous la menace du communisme, et de nouveaux instruments étaient nécessaires après la disparition de l’URSS. Devenue l’unique acteur du nouvel ordre mondial, les États-Unis ont alors mis en place divers tests de crise et de chaos adaptés à la nouvelle situation.
D’abord, à travers le « jihad en Afghanistan », ils ont pris le pouls des masses musulmanes. Ensuite, le concept de « jihad global » a été développé, ouvrant ainsi la voie à une généralisation sous l’appellation de « terrorisme islamique ». Cela revenait à accuser des millions de musulmans d’être des terroristes. Contrairement aux autres religions comme le christianisme ou le judaïsme, pour lesquelles de telles généralisations n’ont jamais été faites, l’islam a été stigmatisé et les musulmans placés sous une suspicion généralisée.
L’organisation terroriste Daech
Avec l’invasion de l’Irak, ce processus est entré dans une nouvelle phase. En collaborant avec l’Iran, les États-Unis ont élaboré une nouvelle conceptualisation, en répandant l’idée que « le terrorisme est l’affaire de l’islam sunnite ». Pour que cette idée trouve un écho et pour justifier l’occupation, il était nécessaire de créer de nouvelles organisations. C’est ainsi que certaines figures ont été transférées d’Afghanistan vers l’Irak, ce qui a donné naissance à Daech.
En réalité, les groupes apparus en Afghanistan dans les années 1990 sont les fruits des politiques troubles menées au cours des 40 dernières années. L’objectif assigné à ces organisations est de déstabiliser les régions habitées par les peuples musulmans, de perturber l’ordre établi et de réprimer les aspirations naturelles au changement face aux régimes antidémocratiques du monde arabe. Daech est donc le produit des expériences menées dans ce contexte, une organisation issue d’une guerre asymétrique organisée par des forces d’occupation grâce à leur savoir-faire et leur intelligence collective.
Si l’on devait utiliser un code Gladio, on pourrait décrire Daech comme une organisation terroriste structurée et dirigée par d’anciens cadres baasistes irakiens, soutenue logistiquement par Maliki et Assad, et bénéficiant du transfert d’agents qualifiés par certains services de renseignement étrangers.
Ceux qui souhaitent mieux comprendre ce sujet peuvent consulter les nombreux rapports d’enquête consacrés à l’organisation. De manière simplifiée, Daech repose sur deux principales bases sociales.
Le groupe qui constitue l’essentiel de l’organisation, est composé de cadres de l’ancien régime baasiste irakien, réunis sous la direction de figures transférées d’Afghanistan vers l’Irak. À cela s’ajoutent des combattants venus de Syrie, d’Arabie Saoudite et des pays d’Afrique du Nord.
L’autre groupe est celui des combattants que la littérature académique qualifie de « combattants étrangers ». Ce groupe est constitué de personnes provenant de plus de 100 pays et ayant été transférés dans la région pour rejoindre l’organisation.
De nombreux rapports ont été publiés sur cette dernière catégorie. Parmi les principales sources à consulter figurent le rapport des Nations unies et celui du Centre international pour l’étude de la radicalisation (ICSR) du King’s College de Londres.
L’organisation attribuée d’une mission
Les acteurs ayant fondé l’organisation avaient assigné à Daech deux missions distinctes.
La première consistait, à l’époque de son émergence, à saboter les processus naturels de changement populaires dans la région, à terroriser les populations et à empêcher l’émergence d’ordres politiques indépendants du contrôle des puissances mondiales. Cette mission a trouvé son écho principalement en Syrie. Servant les objectifs communs des États-Unis, de l’Iran et de la Russie, Daech a été utilisé pour assimiler l’opposition syrienne au terrorisme.
Allant encore plus loin, les États, les peuples et les organisations de la région ont été restructurés à travers Daech. Afin de maintenir une équation chaotique où aucun acteur ne pourrait ni l’emporter ni être totalement défait, les formes les plus organisées du terrorisme asymétrique ont été mises en place. De plus, des zones de conflit « endormies » et des lignes de fracture prêtes à être activées au besoin ont été créées. La durée de plus d’une décennie de la guerre civile syrienne est le produit de cette dynamique.
La seconde mission assignée à l’organisation concernait une transformation religieuse. Autrement dit, il s’agissait de restructurer le kharijisme et le wahhabisme sous le nom de salafisme et de transférer cette idéologie dans les pays à population musulmane. L’objectif de ce jeu était à la fois d’introduire de nouvelles lignes de fracture au sein des musulmans et de favoriser leur enfermement dans un cycle de terreur.
Cette politique trouble peut se résumer ainsi :créer des zones de crise, semer l’effroi en détruisant les civils, diviser les groupes d’opposition en les radicalisant davantage, légitimer l’occupation, prolonger le chaos pour retarder l’établissement d’un ordre stable.
En résumé, voici l’essence des politiques sanglantes et troubles menées à travers Daech. Ces politiques, loin d’être éradiquées, se propagent aujourd’hui en Afrique, avec l’approbation et l’orientation des puissances mondiales. Daech possède désormais des filiales appelées « Wilayats » en Afrique de l’Ouest, dans la région du lac Tchad, en République démocratique du Congo et au nord du Mozambique. En conséquence, l’organisation continue d’être utilisée comme un outil de propagation et de légitimation de l’islamophobie croissante dans le monde.
Les attaques de Daech contre la Turquie
Dès l’apparition de Daech, la Turquie est devenue l’une de ses cibles principales. Les attaques menées contre la Turquie ont pris deux formes : Des attaques psychologiques visant à affaiblir la Turquie et des attaques terroristes soigneusement ciblées.
Les attaques psychologiques consistaient en une campagne de propagande cherchant à associer Daech à la Turquie. Cette campagne prenait la forme suivante : certaines figures médiatiques faisaient des déclarations à la presse étrangère, celle-ci relayait ces propos sans mentionner de sources précises, puis les mêmes personnes revenaient pour dire : « Regardez, les médias internationaux écrivent cela sur la Turquie et son gouvernement. »
Cette campagne de désinformation massive, caractéristique de la guerre psychologique, était orchestrée par des groupes tels que le PKK, le FETÖ et des cercles pro-Assad/pro-iraniens.
Alors que ces groupes tentaient d’associer la Turquie à Daech, ce dernier, de son côté, publiait des fatwas de mort contre le président Recep Tayyip Erdoğan, le qualifiant de « kafir » (mécréant), « tâghût » (tyran) et « mourtad » (apostat). Cette situation révélait une réalité troublante : Daech, le PKK, le FETÖ et les cercles pro-Assad/pro-iraniens étaient en réalité manipulés par un même centre de commandement.
L’autre axe majeur des attaques de Daech contre la Turquie concernait des opérations terroristes ciblant des lignes de fracture spécifiques au sein du pays. Parmi les attentats les plus marquants, on retrouve : Le consulat de Mossoul, Reyhanlı, la boîte de nuit Reina, le massacre de Suruç, le tombeau de Süleyman Şah, L’aéroport d’Istanbul, Sultanahmet, Taksim, Gaziantep, Diyarbakır, l’attentat de la gare d’Ankara
Tous ces attentats ont été minutieusement planifiés et visaient à exploiter et aggraver certaines failles sensibles en Turquie, la fracture entre Alaouites et sunnites
L’opposition entre laïcs et conservateurs, les tensions entre Kurdes et Turcs et les débats liés à la politique étrangère et à l’économie. Ces attaques visaient à provoquer des tensions internes et à affaiblir la cohésion du pays.
Les proches des détenus de Daech en Syrie
J’ai voulu rafraîchir ce cadre général sur Daech pour mieux comprendre la situation des personnes détenues dans les prisons et camps de rassemblement du nord de la Syrie, accusées d’être des proches de membres de l’organisation. Selon le rapport d’Amnesty International du 17 avril 2024, un total de 56 000 personnes sont détenues dans les camps d’Al-Hol et de Roj en Syrie : 11 500 hommes, 14 500 femmes et environ 30 000 enfants. Le rapport mentionne que les États-Unis ont rapatrié 11 de leurs citoyens et ont aidé au retour de six Canadiens, quatre Néerlandais et un Finlandais.
D’après un rapport de Rights and Security International, depuis 2019, au total 3 167 personnes ont été sorties de ces camps : Maldives 26, ’Ukraine 31, Canada 32, Finlande 36, Albanie 37, Suède 37, États-Unis 38, Belgique 45, Azerbaïdjan 56, Pays-Bas 66, Allemagne108, France 223, Kosovo 242, Russie 294, Ouzbékistan 339, Tadjikistan 384, Kirghizistan 454 et Kazakhstan 719.
Le nombre total de citoyens de l’Union européenne rapatriés avoisinerait les 3 000. Cependant, les pays concernés restent largement réticents à recevoir leurs ressortissants.
Le rapport indique que la majorité des détenus sont Syriens et Irakiens, soit environ 50 000 personnes. Les autres détenus proviennent de 74 pays différents. Le gouvernement irakien repousse constamment la récupération de ses citoyens. Un accord a été conclu pour transférer 50 Irakiens par mois, ce qui nécessiterait entre 400 et 500 mois pour rapatrier les 20 à 25 000 Irakiens concernés. Cela ne constitue pas un rapatriement, mais plutôt une instrumentalisation et une exploitation de leur présence. Il en va de même pour les Syriens. Si ces deux groupes principaux étaient renvoyés dans leur pays et placés sous la responsabilité de leur État d’origine, une grande partie du problème serait résolue. La politique que suivra la nouvelle administration syrienne à ce sujet sera également cruciale. Il est important qu’elle prenne le contrôle de ces camps, surveille leur gestion et facilite le rapatriement des citoyens par les pays concernés.
Les personnes soupçonnées d’avoir un lien avec Daech doivent être jugées soit dans leur pays d’origine, soit par la justice de l’État syrien sous lequel elles sont détenues. Le processus dirigé par les États-Unis pose problème, car il maintient ces individus en détention pendant des années sans procès et enferme des femmes et des enfants non affiliés à Daech aux côtés de véritables membres du groupe terroriste, ce qui génère de nouveaux risques. Une telle approche globale entraînera inévitablement des conséquences imprévues pour la sécurité mondiale. Ce problème relève de la Coalition internationale contre Daech, qui ne peut pas se décharger de sa responsabilité en laissant la gestion de la situation entre les mains d’un autre groupe armé. Malheureusement, les risques liés à cette situation ne figurent pas dans l’agenda de la coalition, car les principaux acteurs de cette lutte sont ceux qui ont conçu les politiques ayant favorisé l’émergence de Daech.
Constats d’Amnesty International et de l’ONU
Le rapport décrit en détail les violations des droits subies par les personnes détenues dans ces camps depuis des années. Il fait état de tortures, d’exécutions, de traitements cruels, de privation de soins de santé, de conditions de vie inhumaines, de décès en détention et d’arrestations arbitraires et illégales sans procès.
La Secrétaire générale d’Amnesty International, Agnès Callamard, dénonce les crimes commis par les forces kurdes YPG/SDG : « Les autorités autonomes ont commis des actes de torture, des traitements cruels et des crimes de guerre, y compris des meurtres constituant des crimes de guerre. » Le rapport souligne également la responsabilité des États-Unis dans la mise en place de ce système carcéral, affirmant que : « Les enfants, femmes et hommes détenus dans ces camps et ces installations de détention sont soumis à des atrocités et à une violence choquante. Le gouvernement américain a joué un rôle central dans l’établissement et le maintien de ce système, qui a causé la mort de centaines de personnes par des causes évitables. Il doit agir pour y remédier. »
Le rapport insiste sur le rôle des États-Unis dans l’instauration et l’expansion de ce système illégal de détention, marqué par des conditions inhumaines et humiliantes, des assassinats illégaux et la torture à grande échelle. Il souligne que : « Les violations en cours dans le nord-est de la Syrie ne font qu’alimenter de nouveaux ressentiments et condamner une génération entière d’enfants à ne connaître que l’injustice systématique. Les autorités autonomes, les membres de la coalition dirigée par les États-Unis et l’ONU doivent agir pour mettre fin aux cycles de violences et d’abus. »
Le rapport rappelle également que certaines des personnes détenues dans ces camps sont des victimes de Daech. Parmi elles figurent des Yézidies, des femmes mariées de force à des combattants de Daech, ainsi que leurs enfants, et des mineurs enlevés par l’organisation pour être endoctrinés et entraînés à combattre. Aujourd’hui, ces personnes sont assimilées aux criminels et maintenues en détention. Le rapport précise que ces camps sont administrés par les YPG/SDG, sous un système mis en place par les États-Unis.
La Commission internationale indépendante d’enquête sur la Syrie, soutenue par l’ONU, souligne que depuis la chute du dernier bastion de Daech en Syrie, les personnes détenues dans ces camps, et en particulier les enfants, ont été victimes d’abus. La commission estime que près de 30 000 enfants ont subi ces violences. L’une des membres de la commission, Lynn Welchman, résume la situation ainsi :
« Ces enfants avaient déjà été victimes sous le régime de Daech, et ils ont ensuite été soumis à des violations des droits humains et des abus pendant des années. »
Welchman interroge la légitimité de leur détention :« Ces enfants avaient à peine 8 ou 10 ans, parfois même moins, lorsqu’ils vivaient sous le joug de Daech. Quels crimes peuvent justifier qu’ils soient encore détenus aujourd’hui ? »
Partenariat entre les États-Unis et le PKK et sa nouvelle mission
Comme le souligne le rapport d’Amnesty International, des dizaines de milliers de personnes, prétendument proches de membres de Daech, ont été abandonnées à la merci du PKK et de ses dérivés, servant ainsi à la réalisation de différentes missions. Deux objectifs principaux peuvent être identifiés à cet égard. Le premier est d’utiliser ces personnes comme un outil de légitimation du PKK/YPG. Le second consiste à « tester » la nouvelle administration syrienne qui a remplacé le régime d’Assad et à tenter de limiter sa souveraineté sur l’ensemble du territoire syrien. Il ne s’agit pas d’une organisation, mais d’un nom qui est formaté selon les besoins. Le problème réside dans le fait que des milliers de personnes, prétendument proches de membres de l’organisation, sont maintenues dans des camps pour servir ces deux missions. En plus de ces deux objectifs fondamentaux, la présence de ces personnes est également utilisée pour légitimer la relation des États-Unis avec le PKK et pour exploiter les ressources de la Syrie. Afin de maintenir ces missions, des publications mettant en avant la menace de Daech sont régulièrement diffusées. Tandis que les États-Unis rapatrient leurs propres citoyens, ils empêchent les autres de retourner dans leur pays d’origine.
Des milliers de personnes sont ainsi maintenues dans des camps pour remplir ces nouvelles missions. Selon le rapport d’Amnesty International, il n’y a aucun procès ; des milliers de personnes sont détenues uniquement en raison des accusations portées contre leurs proches. Le rapport précise : « En raison de l’absence de mesures garantissant un procès équitable, une accusation d’affiliation à Daech peut entraîner des années de détention arbitraire. Les femmes et les enfants sont détenus dans des camps en raison des accusations portées contre leurs proches. » L’une des parties les plus remarquables du rapport est l’évaluation suivante : « Aucune des personnes détenues dans le nord-est de la Syrie n’a été poursuivie pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou génocide, qui relèvent pourtant du droit international. » Cette déclaration, ainsi que l’ensemble des évaluations du rapport, confirment les nouvelles missions mentionnées.
Les experts de Human Rights Watch qualifient la situation des détenus en Syrie de « crise humanitaire croissante ». L’état des enfants est particulièrement préoccupant. Le Comité des droits de l’enfant de l’ONU attire l’attention sur leur détention. Ceux qui souhaitent examiner la question en détail peuvent consulter les évaluations de l’International Crisis Group, de Human Rights Watch, du New Yorker ainsi que les rapports du Bureau des droits de l’homme de l’ONU.
Collaboration entre Daech, le Hachd al-Chaabi et le PKK
Un autre point important à examiner est la coopération entre Daech et d’autres organisations terroristes présentes dans la région. Il convient d’abord d’aborder la relation entre Daech et le Hachd al-Chaabi. En analysant les missions assumées par ces deux organisations et les résultats qu’elles ont produits, on constate que, bien qu’elles s’appuient sur des doctrines religieuses différentes, elles servent toutes deux la politique régionale de l’Iran. Daech a contribué à marginaliser et à condamner les mouvements principaux auxquels appartenait la population musulmane de la région, en les enfermant dans une logique de radicalisme. Plus particulièrement, il a discrédité l’idée et l’idéal du Printemps arabe. Une autre fonction importante de l’organisation a été de légitimer, par ses actes de violence, les politiques régionales de l’Iran et son influence sur les États de la région. Par exemple, le discours de la lutte contre Daech a permis de présenter le Hachd al-Chaabi comme une force « légitime » rattachée au Premier ministre irakien.
De la même manière, Daech a contribué à renforcer la légitimité sociale et internationale du PKK et de son réseau régional, qui mène depuis des années des activités terroristes en Turquie et a causé la mort de dizaines de milliers de personnes. L’intervention de Daech a également entraîné l’échec du processus de paix, qui constituait le « projet de réconciliation sociale le plus important de la Turquie ». En réalité, il serait plus juste de parler d’une alliance entre le PKK, Daech et FETÖ sur ce sujet. Ces trois organisations terroristes ont collaboré à la fois pour accuser la Turquie de soutenir Daech sur la scène internationale et pour saboter le processus de paix.
En résumé, pour comprendre la place géopolitique et politique de Daech, il suffit d’examiner ses interactions et connexions avec l’Iran, le réseau du Hachd al-Chaabi et le PKK. Ce qui est clair, c’est que toutes les organisations qui sapent les aspirations naturelles au changement dans la région et qui transforment le territoire en un centre de terrorisme représentent une menace pour les populations locales. En fin de compte, Daech est le produit d’un mal intentionnel conçu par les États-Unis, la Russie, l’Iran et l’Europe pour échapper à leurs responsabilités, ou le « démon » dont ils ont besoin.
Utiliser les populations comme bouclier pour protéger l’Occident
Les États-Unis et les YPG/SDG ont pris en otage des milliers de personnes, principalement des Irakiens et des Syriens, selon l’évaluation d’Amnesty International. Cette organisation souligne également que le traitement infligé à ces personnes constitue un « crime de guerre ». Dans ce contexte, on peut affirmer que ces individus sont utilisés comme cobayes. Les YPG/SDG considèrent la surveillance des camps comme une opportunité pour maintenir leur contrôle territorial. Il est bien connu que le nouveau gouvernement syrien, qui vise à préserver l’intégrité territoriale du pays, ne voit pas cette situation d’un bon œil. Selon les médias régionaux, Ferhat Abdi Şahin a tenté d’assister à une réunion à Damas avec Ahmed Shara, qui l’avait invité pour discuter de l’avenir de la Syrie, accompagné de son superviseur américain. Son insistance pour participer à cette réunion avec un officier américain de rang inférieur illustre clairement la nature des YPG/SDG, leurs allégeances et sous quelle protection ils se placent. C’est un exemple concret de « nationalisme primitif ».
L’objectif d’une Syrie unie et démocratique, tel qu’exprimé dans le discours et les politiques du nouveau gouvernement syrien formé après la Révolution syrienne, ainsi que le processus de désarmement du PKK via Öcalan, initié sous l’impulsion de Bahçeli et poursuivi avec le soutien du président Erdoğan, semblent avoir la volonté et la capacité d’éliminer cette structure déformée. Le rôle de « gardien » que les YPG/SDG ont assumé à cause du vide d’autorité créé par le régime d’Assad et la protection américaine ont perdu leur sens et leur légitimité après la Révolution syrienne. La nouvelle dynamique géopolitique de la région rend impossible pour le PKK/YPG de continuer à exister sous le prétexte de surveiller des individus supposément proches de Daech et sous la protection des États-Unis.
Pour un pays comme la Turquie, qui est directement affecté par les événements de la région, la question clé est la suivante : « Daech doit-il être maintenu comme une menace ou doit-il être définitivement éliminé ? » Tout le monde sait que le maintien de dizaines de milliers de personnes dans des conditions déplorables, exposées à la torture et à la violence comme le rapportent plusieurs sources, créerait un terreau favorable à de nouvelles organisations extrémistes. La véritable solution consiste à résoudre ce problème. Cependant, en tenant compte des actions conjointes des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni et des factions affiliées au PKK, on peut affirmer que le maintien de Daech comme une menace est un choix délibéré.
Indépendamment de l’agenda des puissances étrangères, la meilleure option pour les YPG serait de reconnaître le changement des dynamiques géopolitiques, d’accepter que leur rôle de « gardien » et leur protection américaine ont atteint leur limite et d’intégrer la nouvelle administration syrienne. Tout autre choix ne ferait qu’inviter à des scénarios d’opérations militaires et de conflits. Il est évident que cela ne profiterait à aucun acteur de la région, à l’exception des cercles obscurs qui tirent avantage du chaos.